N’importe Saouak Part IV
Tout est nouveau ici bas.
Nouveaux collants rayés rouges et noirs, nouvelle année, nouvel été, nouvelle culotte H&M, nouveau Mac, nouveaux amis.
Nouveau coeur aussi.
Les saisons changent et les gens passent, ou l’inverse, en tous cas, elle avait enfin décidé de sortir un peu la tête de sa grotte, de visiter les quartiers qui l’entouraient, voir carrément la ville, soyons fous.
Et là comme l’auteur de son destin était un fin blagueur, il avait cru bon de la mettre sur le chemin de Marie, deux ans après sa trahison ultime, elle sortait à peine d’une dépression sévère, et était encore obligée de forcer les zygomatiques pour sourire, ça se sentait comme un marathonien qui a du mal à finir le vongt-septième kilomètre, sachant qu’il lui en reste presque autant derrière.
Marie trouvait heureusement du soutien dans son homme, elle qui avait été virée de son boulot d’infirmière pour avoir injectée cent dix huit fois la dose prescrite à un patient.
Le patient était mort, mais pas d’une mort simple disait Marie.
Deux jours plus tard, elle réflechissait à ce terme de mort simple.
Maintenant qu’elle avait une vie simple, sans remous et surtout, sur une sorte de plateau haut perché de bonheur, elle pensa à la simplicité de la mort de ce patient malheureusement tombé sur cette chiennasse de Marie.
Chiennasse.
Tiens, encore de la rancoeur ?
Merde alors, deux ans plus tard ça en devient maladif là, pourtant, elle était passé à autre chose, non ?
Autre chose de plus simple, comme cette mort, quelque chose de plus sensé, de plus original en quelque sorte, pas simplement un crush au coin d’un bar, une sorte de truc qui s’installe insidieusement mais sûrement pour genre quelques années, un mur en béton armé qu’elle avait un peu commencé à entamer avec la première dispute il y a un mois et demi, mais le crépis était juste un peu rapé, avant que ce mur soit brisé, il allait falloir taper fort.
Elle aimait carrément ce mur.
Il était simple et massif, sûr et bien ancré dans son moral.
Hier soir, un bout de crépis était tombé.
Elle avait rencontré ses amis.
Ils riaient beaucoup, disaient des choses amusantes pour sûr, certains avaient bu, d’autre fumé, et c’était plus ou moins fameux.
Celui qu’elle avait détesté en premier, c’était celui qui l’avait regardée de la tête au pied, comptant la facture totale, et évaluant sa valeur humaine par sa valeur vestimentaire.
Dommage, c’était soirée cheap et fripes ce soir, une robe à volant de 1982, un sweat court et cintré, et ses éternelles Converses Anthracite, et les cheveux coiffés grâce au vent, elle faisait confiance au « je suis naturelle et tes amis m’aimeront pour ça », quel tort.
Ils commençaient à s’envoyer des petites piques, quelques privates jokes, et desuite elle s’était sentie enfermée avec elle-même, ses gens ne souhaitaient qu’elle fasse partie de « leur » groupe.
Ce n’était pas une épreuve d’intégration, l’intégration n’était pas prévue.
« Ils t’ont beaucoup appréciée ! »
Un bout de crépis tombe encore.
Comment être crédible en lui disant « je ne veux pas voir tes amis, ils sont désagréables avec moi dans leur manière d’être ».
Simple.
Sa relation était simple.
Elle devait lui dire.
Sa relation allait mourir simplement, donc.
Elle lui dit : « Ecoute .. tes amis sont amusants, mais je crois .. je crois qu’on est pas vraiment fait pour cohabiter, je veux bien venir quelques fois, mais ne me compte pas d’office pour vos soirées, je regarderais un épisode de L Word, si ils se posent des questions sur mon absence. »
Il la regarda sans paraître plus surpris que ça.
« Ok »
Il sourit et recoiffa sa mèche faussement rebelle.
« Ce soir là, je regarderai L Word avec toi. »
Simple.
Un coup de truelle pour recoller les miettes de crépis.
Marie téléphona aussi ce jour là, elle disait avoir retrouvé du travail dans une clinique spécialisée pour handicapés moteurs en rééducation.
Espérons que leur mort soit simple.
Espérons que toutes nos morts soient simples.
Elle remis un peu de rouge sur ses lèvres, sortit avec son homme dans la rue, s’accrocha à son bras comme si sa vie en dépendait, elle pensait « il est à moi, il est à moi, il est à moi, c’est ma propriété, écartez-vous toutes, c’est mon mur », elle lui murmura « mon petit muret à moi », il sourit et partit à courir, l’entrainant dans les marches du métro, à la limite du déséquilibre.
« Tu crois qu’on peut avoir une relation simple tous les deux ? demanda-t-elle
– Sincérement, si c’est simple, c’est chiant, non ?
– Et bien, par exemple, tu aimerais crever simplement ou de manière bien compliquée ?
– En effet, je crois que je préfererais une relation simple, où tu aurais juste envie de baiser avec moi trois à quatre fois par semaine »
Elle lâcha son bras, lui prit le gras du ventre dans ses mains et serra avec force, jusqu’à ce qu’il émette un cri de vraie douleur.
Il reprit ;
« Bon ok, six ou sept fois »
Elle lâcha son grappin et sourit bêtement avec les dents, l’attrapa avec tout son corps et l’embrassa profondément.
Elle avait une nouvelle vie.
Une nouvelle énergie, un nouvel élan, une nouvelle libido, trois nouveaux soutien-gorge, un nouveau coeur tout neuf protégé par un bon gros mur fait pour durer. Avec du crépis résistant à tout. Et de jolies plantes grimpantes qui fleurissent avec des petites fleurs roses.
Une nouvelle vie simple.
The words are hushed lets not get busted;
just lay entwined here, undiscovered.
Safe in here from all the stupid questions.
« hey did you get some? »
Man, that is so dumb.
Stay quiet, stay near, stay close they can’t hear…
so we can get some.